L'activité physique diminue le risque de cancer
Nous nous intéressons de près à la science pour comprendre pourquoi l'activité physique est bonne pour tout le monde
On peut affirmer sans crainte que la société, aujourd’hui, a intégré la notion des liens essentiels existant entre le corps, l’âme et l’esprit – particulièrement dans les moments de stress et de maladie. Les chercheurs sont fermement convaincus que l’une des clés essentielles pour les trois domaines, c’est de prendre soin du premier : le corps. À l’heure actuelle, les scientifiques tentent de déterminer quelles sont les activités les plus même de diminuer les risques associés au cancer – avant, pendant et après le diagnostic.
Des premières règles apparues tôt, une ménopause tardive, la densité du sein, l’âge de la femme lors de son premier accouchement, des antécédents familiaux relatifs à cette maladie : il y a tellement de facteurs liés aux risques de cancer du sein qui échappent totalement à notre contrôle, qu’il ne semble pas qu’il soit possible aux femmes de faire grand chose pour éviter l’apparition de la maladie ou sa récurrence.
Et pourtant, ce n’est pas tout à fait vrai. « Il y a des choses que nous pouvons faire tous les jours afin de réduire le risque de cancer du sein, d’améliorer nos chances de ne pas mourir de cette maladie et de faire baisser le risque de récidive », déclare Colleen Doyle, MS, RD, directrice du département Nutrition et Exercice physique de l’American Cancer Society.
Paradoxalement, un des meilleurs moyens permettant aux femmes de maintenir leur santé va à l’encontre des conseils prodigués pendant des décennies : jusqu’à récemment, oncologues, chirurgiens et professionnels de la santé recommandaient aux patientes de ne pas déployer une trop grande activité, de se reposer et de se détendre, pendant et après le traitement du cancer. Il s’agissait de se considérer comme convalescente et d’en profiter pour lire par exemple.
Mais en réalité, une des meilleures manières de retrouver la santé, c’est de ne pas rester allongée sur le canapé et de se mettre à faire régulièrement de l’exercice physique.
Faisons de l’exercice – et des statistiques !
Les personnes qui font de l’exercice présentent un risque plus faible de contracter le cancer du sein que celles étant moins actives sur ce plan, affirme Jennifer Ligibel, MD, oncologue médical au Dana Farber Cancer Institute de Boston. En particulier, d’après Madame Ligibel pour les femmes qui font de l’exercice régulièrement, le risque de diagnostic d’un cancer du sein est de 25 à 30% plus faible.
Une étude du Centre allemand pour la recherche sur le cancer (Deutsches Krebsforschungszentrum) de Heidelberg qui a été menée par les docteurs Karen Steindorf et Jenny Chang-Claude, révèle qu’il existe des moyens permettant de réduire le risque de cancer du sein sur lesquels les femmes ont un contrôle. En particulier, ces chercheuses ont découvert que 19,4% des cancers du sein invasifs post-ménopause sont dus aux traitements hormonaux de substitution, et 12,8% à un manque d’exercice physique. La combinaison de ces deux facteurs est responsable de près d’un tiers des cas de cancer du sein, affirment nos deux scientifiques. « En d’autres termes, deux facteurs sur lesquels toutes les femmes peuvent avoir un contrôle sont la cause du même nombre de cas de cancer du sein post-ménopause que les facteurs non influençables », fait remarquer Madame Steindorf.
Une autre étude, publiée en 2007 par le docteur Leslie Bernstein de l’University of Southern California a révélé que les femmes faisant énergiquement de l’exercice pendant cinq heures par semaine voyaient leur risque de contracter un cancer du sein invasif diminuer, en particulier en ce qui concerne le cancer du sein invasif avec récepteurs oestrogéniques négatifs, et ce comparativement à des femmes moins actives.
Un problème accompagnant ces études (et la plupart de celles qui ont été réalisées jusqu’à aujourd’hui) est qu’elles sont de type observationnel : aucune d’entre elles n’est randomisée, fait remarquer Madame Ligibel – par conséquent, il est possible que ce soit précisément les femmes qui se portent mieux – celles qui sont en meilleure santé, qui mangent mieux et qui font plus attention à prendre leurs médicaments – qui communiquent leurs données aux chercheurs. « Il ne nous est pas possible d’établir une relation causale définitive sur la simple base de ces études », explique-t-elle, bien qu’il existe clairement une relation entre l’exercice physique et une augmentation du taux de survie.
Toutefois, les données collectées sont véritablement significatives. Madame Doyle fait même remarquer que l’American Cancer Society publie des articles sur l’importance de l’exercice physique depuis 2000. « Aujourd’hui, ces données sont suffisamment solides pour que nous puissions appeler nos recommandations des « Directives »», ajoute Doyle – ce qui est un grand pas en avant.
Bien entendu, faire de l’exercice ne protège pas totalement, souligne encore Jennifer Ligibel. « Les femmes courant le marathon contractent aussi le cancer du sein », affirme-t-elle. Malgré tout, l’exercice physique peut faire une grande différence, et appartient à une poignée de gestes concrets dont une femme dispose pour améliorer sa santé.
Colleen Doyle note encore que l’exercice est bénéfique pour la santé en général. Il permet d’améliorer la performance cardiovasculaire, la force musculaire, la santé des os et la composition corporelle ; par ailleurs, cela peut également jouer un rôle dans la perte de poids, ce qui présente des avantages intrinsèques. L’exercice physique régulier permet également d’améliorer la qualité de vie en faisant baisser les niveaux de stress, d’anxiété et de dépression, tout en conférant à la personne une plus grande estime de soi. « Cela peut paraître contre-intuitif, déclare Madame Doyle, mais l’exercice peut également contribuer à éliminer la lassitude. »
« Faire de l’exercice régulièrement est bon pour tout le monde », dit encore Jennifer Ligibel. « Mais nous disposons de preuves suffisantes nous permettant d’affirmer que c’est une activité profitant particulièrement aux personnes ayant eu un cancer, en particulier les cancers du sein, du colon et de la prostate. »Quand commencer, avec quel type d’exercice ?
Le meilleur moment de commencer à faire de l’exercice, c’est dès maintenant. Il n’y a pas de moment où faire de l’exercice ne contribue pas à prévenir le cancer du sein, que ce soit lors de sa première apparition ou d’une récidive. Faire de l’exercice avant le début du traitement, pendant le traitement et après le traitement est toujours lié à une diminution du taux de récidive.
Selon Madame Ligibel, en général, une activité physique modérée correspond à faire environ 1,5-1,6 km en vingt minutes mais la définition précise peut varier d’une étude à l’autre. Les femmes concernées ne sont pas des marathoniennes. Elles passent trois heures par semaine à marcher à un rythme modéré. Voilà qui est encourageant : faire de l’exercice peut vous aider à vivre et à allonger votre durée de vie, mais il n’est pas pour autant nécessaire que cela envahisse totalement votre existence. D’après l’American Cancer Society, les activités physiques modérées sont celles que vous pouvez faire en parlant, mais pas en chantant. Elles comprennent tout un éventail de sports et d’activités quotidiennes, dont le yoga, la gymnastique douce, l’équitation, le patin à glace, le ski alpin, le golf, le badminton, le roller, le volley-ball, la marche rapide, la tonte de la pelouse, ratisser le jardin, tailler les buissons ou… faire des tâches ménagères.
Il y a de nombreux autres exemples, bien entendu. D’après les directives de l’American Cancer Society, autant l’entraînement aérobie que l’entraînement de résistance sont importants. La plupart des personnes qui font de l’exercice pratiquent un entraînement aérobie, ce qui fait que la plupart des études se concentrent sur l’exercice aérobie.
Toutefois, l’entraînement de résistance peut être particulièrement utile pour améliorer la santé et la densité des os, de même que la force et la souplesse musculaire. Les études montrent que l’entraînement avec des poids peut avoir pour effet une diminution de la fréquence et de la gravité d’un lymphœdème, signale Colleen Doyle. Les Directives Nutrition et Exercice physique pour les personnes atteintes d’un cancer (2012) de l’American Cancer Society indiquent d’ailleurs qu’un entraînement de résistance modéré pendant et après le traitement peut aider les patients à conserver une masse musculaire maigre tout en évitant les excès de graisse corporelle.
« Avant, on recommandait aux femmes de ne pas pratiquer d’entraînement avec des poids ciblant le haut du corps, par crainte de provoquer ou d’aggraver un lymphœdème », affirme Madame Doyle. Pourtant, il en va tout autrement : « Les femmes ne doivent pas craindre de pratiquer ce type d’entraînement. » En fait, d’après l’American Cancer Society, de nombreuses études ont montré que ce type d’exercice physique est non seulement sans danger, mais qu’il peut même contribuer à une diminution de la fréquence et de la gravité du lymphœdème. L’American Cancer Society recommande l’entraînement en résistance progressive, de s’entraîner avec un thérapeute spécialiste de l’exercice physique et d’utiliser des vêtements de compression appropriés.
Selon toutes les données récoltées par la méta-analyse réalisée récemment, la régularité paie. Même s’il est rare que faire plus d’exercice soit néfaste pour la santé, il est plus efficace de pratiquer un entraînement constant et modéré –
faire tous les jours une bonne promenade en marchant rapidement, par exemple – que de courir un marathon, puis de se reposer pendant un mois.Conserver le poids idéal
L’obésité aussi est un problème. D’après l’American Cancer Society, il existe un lien indéniable entre le surpoids ou l’obésité et l’augmentation des risques pour de nombreux types de cancers, y compris le cancer du sein, chez les femmes après la ménopause.
Si, d’un côté, il est préférable d’atteindre son poids optimal, l’American Cancer Society conseille tout simplement d’éviter de prendre du poids pendant le traitement. Par ailleurs, d’après les directives de cet organisme, viser une perte de poids après le traitement peut avoir des conséquences bénéfiques pour la santé, même si vous ne présentez pas votre poids optimal. Perdre ne serait-ce que 5 à 10% de votre poids peut avoir un impact important sur la prévention d’une récidive. Les professionnels de la santé déterminent le poids sain de l’individu en utilisant l’indice de masse corporelle (IMC), lequel calcule le poids idéal en fonction de la taille de la personne. Pour contrôler votre propre statut, vous pouvez utiliser le calculateur d’IMC sur différents sites tels que www.comment-calculer.com, www.calculersonimc.fr ou encore www.imc.fr.
Sportifs, attention !
Il est plus efficace de pratiquer un entraînement constant et modéré – faire tous les jours une bonne promenade en marchant rapidement, par exemple – que de courir un marathon, puis de se reposer pendant un mois.
Si l’exercice physique est important pour faire baisser le risque de cancer, il ne faut pas pour autant se précipiter à l’extérieur et commencer immédiatement un jogging de 15 km. Veillez à toujours respecter les recommandations des spécialistes. « Une personne qui ne fait pas du tout d’exercice devrait commencer avec des séances d’exercice de dix minutes, quelques jours par semaine », déclare Madame Ligibel. « Ce qui est important, c’est de se donner des objectifs réalistes et de faire les efforts nécessaires pour les atteindre. »
Colleen Doyle recommande de tenir compte du degré d’exercice pratiqué avant le diagnostic de cancer, ainsi que des types de cancer et de traitement suivi. Elle recommande également aux personnes anémiques d’attendre que leur taux de fer augmente. Si vous suivez une radiothérapie, il est conseillé d’éviter le contact avec le chlore, pouvant endommager une peau déjà sensible. Si vous avez un cathéter ou un dispositif pour transfusion, il est conseillé d’éviter l’entraînement de résistance pour la partie du corps concernée (le buste, par exemple).
Par ailleurs, si vous ressentez une très grande fatigue, ne forcez pas. Les patients devraient aussi faire attention au lieu où ils s’entraînent. Une personne en chimiothérapie et qui a un taux de globules blancs faible devrait éviter les salles de fitness et les piscines publiques. De même, une personne ayant subi une transplantation de la moelle épinière devrait éviter les lieux publics pendant environ un an.
En outre, dans le cas de personnes plus âgées qui ont une maladie des os ou sujets à des handicaps importants, comme de l’arthrose ou une neuropathie, il est recommandé de mettre l’accent sur l’équilibre : une chute n’est pas souhaitable. L’American Cancer Society recommande que les patients pratiquent par exemple le vélo semi-allongé plutôt que de faire de la marche sur un tapis roulant.
Pour conclure, les points essentiels sont les suivants : si vous suivez un traitement, faites la quantité d’exercice que vous pouvez maintenant, et essayez de faire plus lorsque vous le pourrez. Ne cessez pas l’activité sportive, il s’agit d’éviter l’inaction. Les bénéfices de l’exercice physique se font sentir durant et après le traitement.